vendredi 25 janvier 2013

Il y avait des lustres ....

Bien longtemps que je n'ai pas publié, trop de colère probablement et pas la force de la coucher sur le papier sans me faire un ulcère, mais là c'est différent! Parce qu'il me semble que c'est surtout l'affaire de tous!

Voilà le texte d'une enseignante et ensuite voilà ma réponse, réponse qui n'en est pas vraiment une, mais plutôt ma réaction, tiens pour rester dans le thème scolaire, voilà ma fiche de lecture!

Pas dans un souci de faire le buzz avec mon blog, parce que je m'en fiche comme de mon premier zéro pointé, je vous invite promptement à lire et à partager, parce que l'on a été un élève, parce que beaucoup de vous ont des enfants scolarisés, parce que parents, enfants, enseignants nous sommes tous concernés!


Cher Monsieur Peillon,

L'illettrisme ? C'est ma faute. Ma méthode de lecture était sans doute trop globale.
Le décrochage scolaire ? C'est ma faute. Je ne suis pas capable d'intéresser mes élèves et rendre l'école attrayante. J...assume.
La délinquance juvénile ? C'est ma faute. Je n'insiste pas suffisamment sur l'Instruction civique et morale. J'assume.
L'obésité ? C'est ma faute. A cause du biscuit à la récré. J'assume.
Les caries ? C'est ma faute. Je devrais fournir le matériel nécessaire à mes élèves afin qu'ils puissent se brosser les dents sur le temps de classe. J'assume.
Théo a 12 ans et porte encore des baskets à scratch ? C'est ma faute. J'aurais dû lui apprendre à faire ses lacets. J'assume.
Arthur s'est fait renverser par une voiture ? C'est ma faute. Je ne lui ai pas fait passer son permis piéton. J'assume.
Zoé ne connait ni ses tables de multiplication, ni sa poésie, ni Jules César, ni Vercingétorix, ni les départements français, ni…. Encore ma faute.
J'aurais dû lui faire apprendre ses leçons pendant qu'elle se brossait les dents d'une main et nouait ses lacets de l'autre, avant de traverser la rue en courant pour éliminer
les calories du biscuit que je l'avais forcée à ingurgiter à 10 heures !

Bref, j'assume tout. Même la crise économique. Il faut bien avouer que l'Etat me paie grassement pour finir mes journées à 16 h 30 et passer le plus clair de mon temps en vacances…. Et j'allais oublier la sécurité de l'emploi…

Alors vous avez raison, Monsieur le Ministre.
Il est grand temps de réformer tout ça.
Le changement, c'est maintenant !
Vous avez enfin dévoilé votre plan pour une grande Refondation de l'École.
Grandiose ! Magnifique ! Courageux ! Audacieux !

Mes collègues et moi-même sommes enfin investis d'une véritable
mission d'intérêt général : supporter et
soulager tous les maux de notre société.
Alors, méprisez-nous, insultez-nous, frappez-nous, instrumentalisez les familles
au nom du bien être et de l'avenir de leurs enfants…
C'est tout ce que nous méritons ! En plus, la
FCPE se gausse et certains de nos syndicats applaudissent.
Franchement, vous auriez tort de vous en priver.

Toutefois, bien qu'irresponsable, paresseuse, incompétente et quelque peu limitée
intellectuellement comparée aux cols blancs de la rue de Grenelle, j'ose vous dire,
Monsieur le Ministre, que votre projet est une hérésie voire même une involution.

1) Bon nombre d'enseignants ne veulent pas de votre semaine de 4 jours et demi.
Quel salarié accepterait de travailler plus pour gagner moins ?
Sarkozy en a rêvé, vous l'avez fait !
2) Vous brandissez l'étendard des rythmes de l'enfant. Il est en effet d'une
logique implacable qu'ils seront moins fatigués en travaillant une demi-journée supplémentaire.
Vous êtes le Ministre de l'Éducation nationale et vous ne vous adressez
qu'aux enseignants. Pourquoi n'expliqueriez-vous pas à moult parents qu'il est
déraisonnable de coucher son enfant à 23h ?...
3) La journée d'école écourtée, bonne idée ! Expliquez à nos concitoyens que
leurs impôts vont financer l'accueil périscolaire (par ailleurs totalement inégalitaire sur le territoire) et que leurs frais de garde
vont augmenter.
Je suis sûre qu'ils apprécieront ! Les maires qui doivent supporter
le coût de votre réforme aussi !
4) Savez-vous que le mercredi est une journée de coupure nécessaire à la santé
mentale des enseignants qui gèrent une trentaine d'enfants chaque jour ?! Ignorez-vous que nous consacrons déjà la majeure partie de
notre mercredi à l'école (formation, corrections, préparations…) ?
Savez-vous que beaucoup de parents apprécient de travailler
à 80 % pour passer le mercredi avec leurs enfants ? Ah oui ! Suis-je bête ! C'est vrai qu'ils sont mieux à l'école que chez eux …
5) Pensez-vous sérieusement qu'en supprimant les devoirs vous lutterez contre les
inégalités sociales ? Venez dans nos classes et montrez-nous comment faire apprendre une leçon à 30 élèves en même temps !
Les parents investis continueront le suivi de leur enfant à la maison. Pour les autres, vous cautionnez leur manque d'intérêt pour l'école et les encouragez à se déresponsabiliser encore un peu plus.
Les enseignants ne sont pas omnipotents et ne pourront jamais se substituer
aux familles ! Leur faire croire le contraire est un mensonge éhonté et dangereux !
Dans notre métier, le temps consacré à l'éducation tend déjà à prendre le pas sur
celui consacré à l'instruction (tant pis pour l'orthographe,
Vercingétorix et Jules César !).
Il est donc grand temps de redéfinir les missions de chacun !
6) Après les MDPH, les PPRE, les PPMS, les DUERP nouvelle révolution : vous
tentez de nous enfumer avec vos PET !
Jamais un sigle naura aussi bien porté son nom !
7) Et les enfants dans tout ça ? On continue de les asphyxier sous le poids de
programmes surchargés et inadaptés. A quand un vrai retour aux fondamentaux ? On continue de les accabler sous le poids d'évaluations
toujours plus normatives et dévorantes.
Quand va-t-on leur rendre le temps d'apprendre ?
On continue le bricolage avec les élèves en difficulté.
Quid des RASED dans votre réforme ?
A quand une véritable égalité sur le territoire des prises en charge en orthophonie,
psychomotricité, psychothérapie…. ? (Jusquà un an dattente dans le Cher !)
On continue d'intégrer les enfants handicapés dans des classes surchargées avec, dans le meilleur des cas, la présence d'AVS sous-payés, plein de bonne volonté
mais pas formés !
La négligence confine parfois à la maltraitance !
Et les collégiens qui décrochent ? On continue de briser des talents sous
prétexte qu'on a raté sa vie si on ne finit pas col blanc ? Pas de manuels, pas de
pâtissiers, pas de boulangers, pas de
plombiers... Au nom de l'égalité, tous bacheliers !
Et tant pis pour ceux qui craquent avant : ils ne pourront plus être orientés à temps !

Je pourrais continuer ainsi bien longtemps.
Vous l'aurez compris, Monsieur le Ministre, il va falloir réviser votre copie !
Les enseignants ne sont pas hostiles à toute réforme. Au contraire, nous voulons
redresser notre école. La refondation doit se faire avec nous. Nous sommes les premiers acteurs du système éducatif. Qui peut prétendre
mieux le connaître que nous ? Nous débordons d'idées, de suggestions
alors écoutez-nous !
Je n'appartiens plus à aucun syndicat, je ne suis membre d'aucun parti politique, mes
propos ne feront sans doute pas l'unanimité, cest pourquoi je vous invite à consulter le
blog du collectif des Dindons.
Vous constaterez alors qu'il y a au moins deux points sur
lesquels nous sommes tous d'accord : votre projet en l'état actuel des choses est
inacceptable (aussi bien pour les élèves que leurs enseignants) et nous ne nous
laisserons pas déplumer !

J'appelle maintenant les deux premiers syndicats enseignants de France à ne plus
rester sourds aux glouglous de leur base.
J'appelle tous les enseignants dépités, découragés, résignés à rester en colère.
J'appelle tous les parents qui veulent pour leurs enfants une école publique, républicaine
et laïque digne de ce nom à nous rejoindre.
J'appelle tous les maires de France qui refusent d'assumer le poids de cette
réforme à faire entendre leur voix.
J'appelle tous ceux qui se considèrent comme les dindons de cette farce à la mobilisation !
Soyons la nouvelle grippe aviaire de cet hiver !
 
Mon dieu ce que cela fait écho en moi! Je pourrais culpabiliser en disant qu'ayant quitté le navire depuis quelques temps, je n'ai pas assumé ma mission jusqu'au bout, bref le combat jusqu'à la mort! 
L'école se meurt depuis plus de 20 ans à mon sens, une longue agonie insupportable! J'applaudis ce texte qui dit parfaitement bien la réalité de l'école: la non reconnaissance des enseignants qui doivent se targuer aujourd'hui d'un bac+4 pour enseigner ne serait ce qu'en maternelle, avec des formations toujours plus incomplètes, obsolètes et prétentieuses au sein des IUFM! Et pendant ce temps là, ça pontifie à tout va! 
On est instit toute sa vie, dès lors qu'un jour on s'est senti véritablement investi dans sa mission pédagogique, peu importe que vous ayez pris ensuite d'autres voies! Pour ma part, je tremble toujours autant du stylo rouge à la vue des fautes, je m'interroge perpétuellement sur le degré d'illettrisme chez certains, pas pour autant dénués d'intelligence, je tente de comprendre quel parcours, quelle relation à l'école ont pu avoir ces gens! Je prêchais, et encore aujourd'hui, le droit à être tout autant respecté quand un enfant fait le vœu d'une formation d'apprentissage plutôt qu'un gavage pour être bachelier! J'ose croire encore qu'on peut apprendre en s'amusant, que l'on peut prendre du plaisir à s'instruire, à découvrir, et que ce ne doit pas être qu'une étape pour devenir un mouton bêlant courant après l'emploi que l'on sait déjà être comme une chimère! 
"Il faut bien travailler à l'école pour avoir un bon travail dans la vie!" Comment peut-on encore faire croire à ce mensonge? Quand les enfants voient leurs parents au chômage, les grands frères et grandes sœurs tenter en vain de trouver stage, petit boulot pour s'en sortir, comme peut-on encore leur faire croire que l'école est la solution quand autour d'eux tout est si fragile? 
Elle le dit si bien, "Les parents investis continueront le suivi de leur enfant à la maison. Pour les autres, vous cautionnez leur manque d'intérêt pour l'école et les encouragez à se déresponsabiliser encore un peu plus.
Les enseignants ne sont pas omnipotents et ne pourront jamais se substituer
aux familles !" 
Non messieurs dames, chaque rentrée de septembre, les enseignants ne mettent pas au monde une trentaine d'enfants dont ils auront la responsabilité éducative, instructive, pédagogique! A chacun son métier, enseignant c'est pas synonyme de parent, hormis la rime, ce sont deux fonctions qui n'ont rien de commun! Tant que les mentalités et le regard sur l'école, sur ses enseignants ne changera pas, tant qu'on stigmatisera les enseignants comme étant des planqués qui foutent rien de la semaine et ont des vacances à gogo, on ne pourra pas changer l’École fondamentalement! Les enfants ne peuvent pas investir les lieux, croire en l'enseignement si de retour chez eux, leurs propres parents crachent dessus! 
Je me souviens d'un élève, qui m'a dit un jour, qu'étant donné que ses parents payaient des impôts, ils payaient donc mon salaire, et que j'étais sa bonne à sa disposition par conséquent! Oui ça va aussi loin! Et ce, chez des enfants d'une dizaine d'années, qui ne font que répéter les dires de leurs aînés! Après dix années de bons et loyaux services, et encore pour ma part, dans le monde de l'enseignement spécialisé, le parent pauvre de l’Éducation Nationale; parce que les handicapés mentaux, pfff, c'est bon, on les a sortis des HP (hôpitaux psychiatriques) pour faire plus humains, on ne va pas nous plus se fendre de leur enseigner quoique ce soit à ces "boites vides", bah non tiens!; bref après cette décennie, ils ont réussi à m'épuiser et à tarir la source qui alimentait ma foi en mon métier!

"L'enfant au cœur des apprentissages", j'en ai vomi de cette maxime de merde! L'enfant, le saint enfant, l'enfant roi, l'enfant source de toutes les préoccupations actuelles, l'enfant que l'on ose traumatiser en lui imposant des parents de même sexe, l'enfant de famille monoparentale qui immanquablement va avoir plus de difficultés dans sa scolarité, parce que papa n'est plus là, l'enfant, petit être que l'on brandit comme un étendard se foutant depuis longtemps en fait de son bien être, de ses réels besoins, de son avis! L'enfant, le prolongement de soi au détriment de sa propre existence, bref l'enfant qui en perd son latin, ne connait plus la solution au problème, et s'embourbe un peu plus dans les méandres de grands bien pensants du ministère!


Pour finir, il n'est pas du seul ressort des enseignants de se battre pour sauvegarder u
ne école forte, une école qui donne sa chance à tous sans étouffer les espoirs de chaque élève! Il est grand temps que les parents, les partenaires éducatifs, les maires s'unissent pour défendre un des derniers bastions d'une démocratie républicaine et laïque!